Sur le terrain

Un enseignant « mobilisateur » du Malawi nommé pour le Global Teacher Prize

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Andrews Nchessie

Andrews Nchessie est enseignant à l’école d’application et à l’école de formation des maîtres de Kasungu au Malawi. Il fait également parti des pionniers du système éducatif du Malawi, puisqu’il a conçu de nouvelles méthodes d’apprentissage pour jeunes enfants, mais aussi trouvé de nouveaux moyens pour les enseignants d’améliorer leurs méthodes d’enseignement. 

Par Kwesi Brako

Andrews Nchessie souhaite favoriser l’engagement et la motivation des élèves dans les classes surchargées qui manquent cruellement de ressources. Pour cela, il met au point des systèmes d’aide à l’enseignement basés sur la communauté, ainsi que des méthodes permettant aux élèves d’apprécier les résultats de leur apprentissage, par exemple, en installant une station météo pendant le cours de météorologie. Andrews Nchessie a également créé des méthodes d’enseignement pour les enfants handicapés et fourni du matériel à 150 programmes télévisés d’éducation scientifique.

Ces efforts ont enfin obtenu la récompense qu’ils méritent à l’échelle mondiale, puisqu’Andrews fait partie des 50 prétendants au Global Teacher Prize, un prix d’un million de dollars qui souligne le travail effectué par « les meilleurs enseignants du monde », « ceux qui savent motiver leurs élèves et les communautés qui les entourent ». Quel que soit le résultat des délibérations (annonce le 16 mars), Andrews restera un moteur de changement et de progrès et ses travaux continueront à faire parler d’eux pendant de nombreuses années.

Malgré cette période de grands chamboulements dans sa vie et sa carrière, Andrews a gentiment accepté de répondre à nos questions et de partager avec nous ses succès, ses difficultés et sa vision de l’avenir.

D’où vous vient cette envie de créer de nouvelles méthodes d’enseignement ?

Aux futurs enseignants, l’université commence par apprendre la théorie et la pratique de l’enseignement. Le problème, c’est qu’il y a toujours un gouffre entre la théorie et la pratique, particulièrement dans le contexte du Malawi. Par exemple, la plupart des théories enseignées n’évoquent jamais des classes de 180 élèves ne disposant pas de ressources adéquates. Je me suis toujours efforcé d’identifier ce qui peut fonctionner pour ces classes, au point que cela est devenu ma manière d’enseigner. Cela m’a permis de ne jamais considérer les classes nombreuses et en manque de ressources comme un problème mais plutôt comme une occasion d’agir pour faire en sorte que chacun de mes élèves ait appris quelque chose à la fin de la journée. J’ai ainsi créé de nouvelles pédagogies pour la gestion des classes nombreuses par un seul enseignant.

À l’université, ils ne vous apprennent pas non plus à travailler avec des enfants handicapés. Confronté à un élève qui était né sans mains, j’ai donc conçu des pédagogies pour lui permettre, à lui et à d’autres enfants handicapés, d’apprendre à lire et à écrire des mots et des chiffres. Je leur ai appris à utiliser leur bouche ou un doigt pour écrire. Cela a fonctionné et cela fonctionne encore. Le dilemme, c’est que quand vous êtes confronté à cette réalité, vous ne pouvez pas renvoyer un enfant chez lui. Vous devez trouver les moyens de permettre à cet enfant d’apprendre, et cette manière de procéder a donné d’excellents résultats.

Quelles ont été vos réussites et quels problèmes avez-vous rencontrés dans l’utilisation de vos méthodes ?

J’ai assisté à de nombreux succès. Tout d’abord, il faut bien comprendre que les classes nombreuses et sans ressources sont tout à fait ordinaires ici. Elles font partie de la réalité quotidienne à laquelle les enseignants du Malawi sont confrontés. Les enseignants sont donc très intéressés par ces méthodes qu’ils utilisent énormément comme le rapportent les inspecteurs des écoles primaires du pays. Lors des rassemblements, les enseignants eux-mêmes nous racontent les bienfaits de ces méthodes qui leur permettent généralement d’améliorer la discipline et le contrôle de la classe. L’utilisation de telles approches a également suscité l’intérêt de l’université d’Aberdeen et de l’université de Strathclyde qui ont lancé des travaux de recherche en ce sens et ont également participé à l’élaboration du cursus primaire qui est actuellement mis en place au Malawi.

J’ai aussi été confronté à un certain nombre de problèmes. Par exemple, certains enseignants continuent à appliquer les méthodes d’enseignement traditionnelles sans tenir compte de la taille des classes et du manque de ressources. D’autres souhaitent être formés à ces nouvelles méthodes d’enseignement, mais les moyens de communication et de déplacement qui permettraient de les atteindre sont inexistants.

Utilisez-vous les TIC pour le développement de votre nouveau cursus ?

Oui, j’utilise les TIC pour développer le nouveau cursus. Le cursus actuel comprend d’ailleurs l’apprentissage des TIC de base et de leur utilisation. Ces matières sont obligatoires et feront l’objet d’un examen, ce qui signifie que tous les élèves doivent suivre ces enseignements.

Quels sont vos espoirs et vos attentes vis-à-vis de ces avancées éducatives ?

J’espère que ces méthodes axées sur l’engagement et la motivation permettront d’améliorer l’enseignement et l’apprentissage. Il [le gouvernement] s’efforce également d’améliorer la qualité de l’éducation, ce qui devrait, à long terme, inciter les enfants à continuer à apprendre tout au long de leur vie et permettre aux filles de rester à l’école grâce aux méthodes de participation équitable utilisées en classe.

Le Global Teacher Prize a mis en lumière d’autres facettes du travail d’Andrews Nchessie, expliquant que celui-ci a su « sensibiliser ses élèves aux problèmes mondiaux grâce à des projets de plantation d’arbres à grande échelle et à des activités de développement communautaire comme le nettoyage des chemins qui mènent à l’école. Il a également apporté sa contribution à la communauté en achetant un moulin à maïs et en créant des groupes de soutien aux personnes souffrant du VIH/SIDA. »

Andrews Nchessie explique que s’il gagne le prix, il utilisera l’argent pour organiser des actions de formation à destination des enseignants du Malawi. Ensemble, nous lui souhaitons bonne chance, pour le prix, mais aussi pour la réalisation de ses projets grâce auxquels il espère révolutionner le système éducatif du Malawi.

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