« Dans une zone rurale d’Afrique du Sud, un homme arrive à l’hôpital présentant les symptômes classiques d’une insuffisance cardiaque. Pour confirmer le diagnostic, et décider du traitement adapté, un seul examen est nécessaire. La première tentative pour réaliser cet examen échoue car l’équipement est en panne. Lorsqu’un équipement de remplacement est trouvé, le médecin de garde découvre qu’il n’y a plus de papier dans l’appareil pour imprimer les résultats. Étant dans l’impossibilité de réaliser cet examen vital, le médecin renvoie donc le patient chez lui. Quelques jours plus tard, ils sont informés que l’homme est mort. Ce patient est mort car quelqu’un a oublié de commander davantage de papier. »
Par Alicia Mitchell
Cette histoire a été racontée par Rebecca Harrison, Directrice du programme African Management Initiative (AMI), lors de la session Avis de recherche: de nombreux entrepreneurs et managers africains, lors de l’édition 2013 d’eLearning Africa. Cet homme est mort, explique Harrison, non pas des suites d’une complication médicale mais des suites d’une négligence managériale. « Le management est important, continue-t-elle, car il sous-tend des questions essentielles. »
Elle a aussi donné l’exemple d’un bon management, permettant d’obtenir d’excellents résultats, et provenant de son expérience personnelle et de sa démarche d’adoption : « On entend souvent dire que le processus est horrible mais pour nous, cela a pris tout juste trois mois, tout cela grâce à un excellent manager. Grâce à son travail assidu elle a épargné à un petit garçon toute une vie dans une institution. »
En brossant le tableau de la situation actuelle de la formation au management sur le continent, Harrison a révélé qu’à l’heure actuelle, il n’y a qu’une école de commerce pour dix millions d’habitants en Afrique, et la plupart d’entre elles n’ont pas le niveau nécessaire pour offrir l’enseignement de qualité que l’on retrouve ailleurs. En Afrique, a-t-elle expliqué, « la formation en interne est limitée, le marché privé de la formation est très inégal, le soutien aux PME n’est pas viable et les bons modèles positifs se font rares. »
L’African Management Initiative s’est fixée comme objectif ambitieux de créer un million de managers africains efficaces, professionnels et innovants d’ici 2023. Pour ce faire, l’Initiative vise à établir de bonnes pratiques en construisant une communauté virtuelle de managers efficaces et de produire un contenu gratuit en ligne pour le peer learning local et la formation en milieu professionnel. De plus, l’AMI lancera également le tout premier African management MOOC, en réponse à une vaste demande des utilisateurs, le 17 juin 2013.
En parlant du cas égyptien et des tentatives de libérer le vaste potentiel de la main-d’œuvre locale, Ahmed El-Sobky, responsable du bureau technique de l’agence Information Technology Industry Development Agency (ITIDA), a souligné la nécessité d’encourager l’esprit d’entreprise sur le continent, mentionnant la stratégie d’innovation annoncée en Egypte en 2008, qui met en place un cadre pour encourager les étudiants, dès le début de leurs études, à être des entrepreneurs innovants.
Horst Weinert, Directeur général de Festo Didactic, a fait part de son expérience concernant la manière dont on peut encourager la compétitivité, l’esprit d’entreprise chez les étudiants, et ce faisant, leur permettre d’acquérir les aptitudes qui leur donneront l’espoir de décrocher un emploi. En associant le travail pratique en laboratoire ayant recours à des équipements qui reflètent le niveau actuel de l’industrie, avec des programmes d’eLearning interactifs et des projets en compétition, Weinert s’est retrouvé à la tête d’une classe d’étudiants inspirés et auto-stimulés. « Lorsque l’époque des examens est arrivée, a-t-il déclaré, ils savaient déjà tout ! La moitié d’entre eux avait déjà décroché un poste avant d’avoir terminé et les cinq meilleurs étudiants sont partis pour créer leur propre entreprise, créant par la même d’autres emplois. » La clé du succès résidait dans la mise en avant de la compétition et l’utilisation mixte de l’eLearning, qui incitaient ainsi les étudiants à trouver des informations par eux-mêmes tout en permettant aux professeurs de devenir des « facilitateurs, plutôt que des incitateurs », expliquait Weinert.
Le thème récurrent de la session fut certainement le fossé des compétences entre les besoins de l’industrie et ce que produisent les systèmes éducatifs actuels. Ahmed El-Sobky a souligné le défi auquel l’Égypte doit faire face, pays dans lequel plus d’un demi million d’Egyptiens sont inscrits à l’université : « L’Égypte tente de convertir ces jeunes en une main-d’œuvre qualifiée » a-t-il déclaré. Nous espérons que les initiatives innovantes et fondées sur l’industrie présentées lors de cette session, la clameur grandissante en Afrique en faveur d’une réforme de l’éducation, le besoin de s’adapter aux demandes modernes des employeurs, permettront de pouvoir relever ce défi.