Un récent rapport de VC4Africa (le principal réseau de mise en relation d’investisseurs et d’entrepreneurs africains) a révélé une croissance significative du nombre de créations de start-up en Afrique en 2014.
Par Jessamine Brown
Le montant total des capitaux investis dans des start-up africaines s’élève à 26,9 millions de dollars en 2014, soit plus du double de l’année précédente (12 millions de dollars). Le montant moyen investi par entreprise est également passé de 130 000 $ en 2013 à 200 000 $ en 2014. Le pays qui engrange le plus de financements de start-up est le Nigéria, suivi de près par le Kenya, l’Afrique du Sud et le Ghana.
Même si le processus n’en est qu’à ses balbutiements, les start-up africaines enregistrent une croissance sans précédent, une évolution particulièrement positive pour le continent sachant que bon nombre de ces projets ont pour objectif de résoudre des problèmes de base dans des secteurs tels que l’éducation et la santé, mais aussi de contribuer au développement économique de l’Afrique.
Quelle est donc l’origine de cette croissance sans précédent du nombre de start-up ? Pourquoi les investisseurs sont-ils de plus en plus attirés par l’Afrique ? Quelles sont les plus grandes réussites de l’année passée ?
Un des moteurs indiscutables de l’activité entrepreneuriale en Afrique est le sentiment d’optimisme et l’attitude positive qui règnent actuellement en Afrique ; une tendance confirmée par Mike Herrington, directeur exécutif de Global Entrepreneurship Monitor et professeur à l’université du Cap, dans l’interview qu’il a accordée à CNN :
« Le visage de l’entreprenariat en Afrique subsaharienne est incroyable. Le secteur est en pleine expansion, car l’Afrique est enfin en train d’émerger et que les économies prospèrent. Plusieurs pays commencent vraiment à voir leur activité entrepreneuriale se développer ; ils passent d’un entreprenariat de nécessité à un entreprenariat d’opportunités […]. Les opportunités prolifèrent et un état d’esprit positif commence à émerger au sein de la population de ces pays. »
Cette attitude optimiste associée à un nombre croissant d’incubateurs et de hubs technologiques a conduit à une hausse considérable de l’activité entrepreneuriale. L’Afrique du Sud, en particulier, est maintenant surnommée la « Silicone Savane » en raison du nombre important de grandes entreprises technologiques qui y voient le jour, conséquence probable de la présence de nombreuses universités techniques dont les salariés sont parmi les personnes les mieux éduquées en Afrique.
L’augmentation du nombre de start-up fait venir les investisseurs, qui sont attirés comme des aimants par l’accélération de la croissance économique du continent. L’Afrique abrite actuellement cinq des 12 pays les plus prospères du monde, sachant que le Nigéria (la plus grande économie africaine) vient d’être intégré au groupe « MINT » des nouvelles puissances économiques émergentes.
D’un point de vue plus général, le PIB de l’Afrique a augmenté de 5 % au cours des 10 dernières années et devrait, d’après la Banque mondiale, croître plus rapidement que celui de tous les autres continents dans les années à venir. Malgré des infrastructures clairsemées et de gros problèmes de connectivité, il semble donc que la croissance de l’Afrique soit en bonne voie, ce qui la rend particulièrement séduisante pour les investisseurs avisés. Pour les entreprises de capital-risque, qui aiment généralement obtenir un rendement de deux à trois fois le montant de leur investissement en moins de cinq ans, le boom des start-up technologiques africaines est une opportunité à ne pas manquer.
Mais qui sont les investisseurs qui voient en l’Afrique une source de prospérité à venir ? Ces dernières années, ce sont les gros conglomérats technologiques tels que Google, IBM et Microsoft qui se sont tournés vers le continent. L’année dernière, Microsoft a versé pas moins de 100 000 € au total à cinq entreprises du Kenya, d’Ouganda et du Nigéria dans le cadre de son programme 4Afrika, tandis qu’IBM a monté des centres d’innovation à Lagos et à Casablanca.
« Au cours des 10 dernières années, l’Afrique a subi un nombre incroyable de transformations, a expliqué Solomon Assefa, chercheur chez IBM et vice-président de Science and Technology à Techcrunch. Avec de plus en plus de stabilité, une bande passante en large augmentation, une croissance économique exceptionnelle, la construction de multiples infrastructures et beaucoup d’investissements étrangers, […] nous estimons que l’Afrique est vitale pour nous et qu’IBM va jouer un rôle prépondérant dans sa croissance et son développement futurs. »
Les grands conglomérats technologiques ne sont pas les seuls à injecter de l’argent dans les entreprises africaines. Les investisseurs providentiels locaux et les Africains de la diaspora ont également tout intérêt à investir sur leur continent d’origine.
L’année dernière, plusieurs start-up ont enregistré de très gros succès. Par exemple, BRCK qui a réussi à recueillir 1,2 million de dollars de financement initial après avoir récolté un premier montant de 172 000 $ sur Kickstarter. La société a produit un dispositif Wifi auto-alimenté, conçu et prototypé au Kenya, qui établit une connexion Internet en s’appuyant sur tous les réseaux de connexion disponibles et qui est capable de survivre dans les environnements les plus rigoureux. La connectivité reste un problème crucial en Afrique sachant qu’un Africain sur cinq seulement a accès à Internet. BRCK permet de lutter contre ce problème en apportant le Wifi dans les régions les plus reculées du continent.
La santé fait aussi partie des principaux secteurs ciblés par les start-up technologiques. mPedigree, une initiative ghanéenne, a été créée pour lutter contre le problème de la contrefaçon de médicaments. L’entreprise s’est associée à plus d’une vingtaine d’opérateurs de télécommunications pour aider les utilisateurs à déterminer si un médicament est ou non une contrefaçon.
« En tant que prestataire de services de TIC, nous avons mis au point un écosystème de transparence de la chaîne d’approvisionnement qui a un impact énorme sur la santé », a expliqué Bright Simons, président de mPedigree, lors de son intervention à la conférence eLearning Africa 2014.
Zoona est une plate-forme mobile de transfert d’argent établie en Afrique du Sud, en Zambie et au Malawi. Elle permet aux entrepreneurs de proposer des services de transfert d’argent et de paiement aux consommateurs à faible revenu, tout en recueillant des commissions et en créant des emplois. La plate-forme devrait aider les entreprises à se développer et promouvoir l’intégration financière en Afrique, ce qui devrait, à son tour, favoriser le développement économique.
La dernière start-up que nous allons évoquer est Obami, une plate-forme sociale d’apprentissage basée au Cap qui met en relation des enseignants, des élèves et des parents. Elle combine le concept de réseau social à celui de l’eLearning pour permettre aux écoles et aux organismes universitaires africains de partager leurs ressources et de se tenir informés des nouvelles tendances en matière d’éducation.
Toutes ces start-up technologiques sont autant d’illustrations du niveau d’innovation qui prévaut en Afrique actuellement et du rôle que cette innovation peut jouer dans le développement social et économique du continent.
Après un tel niveau d’investissement et de croissance en 2014, il sera particulièrement intéressant d’observer l’évolution du secteur des start-up en 2015.