En Afrique, selon Karl Elvis Nsumbu Mba, fondateur et président du Forum des Jeunes du Gabon (FOJEGA), malgré l’existence de l’Organisation Africaine de la Propriété Intellectuelle (OAPI, voir encadré), le droit de propriété intellectuelle peine à trouver sa légitimité et un terrain d’application dans l’espace économique. C’est pour alimenter le débat sur la propriété intellectuelle en Afrique, convaincre les participants de l’importance du sujet et expliquer comment la protection des droits de propriété intellectuelle et la promotion des œuvres peuvent s’appuyer sur les TIC, que Karl Elvis Nsumbu Mba participera à la prochaine édition de eLearning Africa, en mai 2011.
Par Christine Cayré
Karl Elvis Nsumbu Mba a 25 ans. Il se présente avant tout comme un chercheur et un activiste qui défend le développement durable et l’écologie. Après des études de droit et de marketing relationnel, il s’intéresse à la propriété intellectuelle à partir de 2008 alors qu’il prend part à la première semaine nationale de la propriété intellectuelle à Libreville au Gabon organisée par le Centre de la Propriété Industrielle du Gabon(CEPIG). Ce sujet devient un des ses chevaux de bataille. Pour rajouter des cordes à son arc, il obtient un diplôme en Propriété intellectuelle à l’Académie mondiale de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI) à Genève et consacre désormais une grande partie de son temps à ce sujet en prenant part à divers séminaires en tant qu’activiste et spécialiste en droits d’auteurs et droits connexes. Pour Karl Elvis Nsumba Mba la propriété intellectuelle est un pilier du développement en Afrique et la protection des inventions et des innovations sur le continent devrait être plus systématique. Dans une économie où les idées ont de plus en plus d’importance, l’innovation est créatrice de valeur et le brevet est un élément clé au cœur du dispositif car il permet de créer de la richesse à partir des idées et de leur originalité.
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Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle, quelques repères.]
OMPI est une institution spécialisée des Nations Unies depuis 1974 qui compte 184 pays adhérents. Selon l’OMPI, sa mission consiste à « élaborer un système international de propriéte intellectuelle qui récompense la créativité, stimule l’innovation et contribue au développement économique tout en préservant l’intérêt général ». L’OMPI développe une branche africaine à partir du 13 septembre 1962, date de la signature à Libreville au Gabon d’un accord portant création de l’Office Africain et Malgache de la Propriété Industrielle (OAMPI). Cet Accord est révisé à Bangui en République Centrafricaine, le 2 mars 1977, pour donner naissance à l’Organisation Africaine de la Propriété Intellectuelle (OAPI). Le 24 Février 1999, l’Accord de Bangui est à son tour modifié. Il s’agit entre autres d’élargir la missions de I’OAPI qui doit notamment promouvoir le développement des Etats membres au moyen notamment d’une protection efficace de la propriété intellectuelle, des droits connexes et assurer la formation en propriété intellectuelle. Dans cette nouvelle version de l’accord, la protection est élargie à des objets nouveaux comme par exemple les obtentions végétales, les indications géographiques ou encore les œuvres littéraires et artistiques. Le nouvel Accord est entré en vigueur le 28 février 2002. L’OAPI compte actuellement 15 pays membres.
www.wipo.int/portal/index.html.fr[/callout]
Selon Karl Elvis Nsumbu Mba, la propriété intellectuelle reste pourtant un concept encore trop flou sur le continent, éloigné des réalités et des véritables besoins. Il déplore l’absence de sociétés de gestion collective du droit d’auteur et des droits connexes, ou encore de l’absence d’ experts en propriété intellectuelle dans la majeure partie des pays africains. « Je pense que beaucoup de gens ont encore une vision erronée de la propriété intellectuelle. Comme si cette notion ne pouvait leur appartenir et restait ésotérique » déclare t-il. Pour lui, l’OAPI ne remplit pas correctement sa mission. « La propriété intellectuelle est désormais incontournable -insiste t-il – il faudrait la promouvoir de façon dynamique et interactive. » Et le chercheur d’expliquer ses projets de formation dans les lycées phare, écoles supérieures et autres universités. Il envisage même un programme télévisé en partenariat avec la chaîne nationale publique. Son objectif est de démystifier le sujet et sensibiliser ses compatriotes parce que selon lui, l’émergence d’un pays et son développement passent nécessairement par la protection du droit de ses auteurs, inventeurs et créateurs. Mais le jeune homme déplore le manque de fonds à l’heure où selon lui, l’Afrique ne peut pas se permettre de passer à côté de cet enjeu essentiel.
« Les enjeux sont juridiques autant qu’économiques mais il en va aussi de la préservation du patrimoine culturel » ajoute Karl Elvis Nsumbu Mba. « Je pense à cette jeune fille, une étudiante en lettres moderne , a qui j’ai prodigué des conseils pour qu’elle protège ses textes et ses créations chorégraphiques. Désormais elle ne pourra pas être plagiée impunément. » Dans le domaine de la création artistique et au-delà de cet exemple, il s’agit de répertorier les œuvres d’un pays, de reconnaître et d’organiser ses richesses et de promouvoir son identité culturelle. « Il existe une grande disparité entre les pays africains » déplore Karl Elvis Nsumbu Mba. « Certains, comme le Burkina Faso, sont en avance et le FESPACO en est l’illustration éloquente. Le Festival Panafricain du Cinéma de Ouagadougou, qui met en avant la création audiovisuelle africaine est un modèle en matière de valorisation économique de la culture africaine et il ne peut en être ainsi que parce que les structures de protection de la propriété intellectuelle sont déjà en place . Au Gabon, nous sommes juste en train de préparer le terrain, mais la notion de propriété intellectuelle a encore beaucoup de chemin à faire.»
En participant à eLearning Africa en Mai prochain, Karl Elvis Nsumbu Mba veut aussi faire le lien entre propriété intellectuelle et TIC. Il parlera notamment de la nécessité de maîtriser un outil comme Internet qui permet, en positif, de promouvoir les œuvres mais, aussi en négatif, de les utiliser sans autorisation.