Un atout pour les projets éducatifs sur le continent?
Entre tradition et innovation, le continent africain possède certainement cette grande capacité d´avoir recours à de nombreuses pratiques collaboratives en matière de transfert de compétences et de partage des connaissances, de collectage des savoirs et d´expertises au sein des communautés.
Tant pour faire face aux contraintes économiques que pour exercer la solidarité ordinaire dans la collectivité, les modèles de financement alternatifs ou complémentaires, par exemple sur le principe de la Tontine(1), ont une tradition bien ancrée dans la culture africaine, ce qui permet la mise en œuvre de nombreux projets de développement territorial et d’entreprises nouvelles. La flexibilité et l’ingéniosité y sont les précieux alliés de toute vertu.
Ces pratiques collaboratives « libres» de la gestion des connaissances et de l’économie solidaire, sont aujourd’hui amplifiées par la banalisation rapide d’accès aux outils numériques et aux réseaux sociaux, particulièrement par le biais de la téléphonie mobile.
On peut donc dire que les conitions nécessaire au crowdsourcing, car c’est bien de ça qu’il s’agit ici, l’utilisation et la valorisation de l’intelligence collective, sont bien inscrites dans les différentes cultures du continent africain.
L’extension de ces nouvelles pratiques e dait en fonction de l’accès aux outils, le low cost jouant ici un rôle préponderant (cf. le cas de la tablette sino-indienne Aakash) (2), du déploiement croissant des infrastructures réseaux (cf. le projet fibre optique/ West Africa Cable System) (3) et surtout de l’appropriation des modèles et des règles juridiques propres aux donnèes libres (open data) et à leurs applications (p.ex. la production de contenus générés par les usagers eux-mêmes/cf. Ushabili, la mise en ligne d’informations par le gouvernement kenyan et marocain ein 2011) (4)
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Mais de quoi parle-t-on quand on parle de crowdsourcing?
Le crowsourcing se décline sous plusieurs variantes sur le continent africain:
– Le crowdfunding, autrement dit l’appel aux dons ou à un financement partagé le plus souvent par des personnes privées, se fait sur une plateforme dédiée en ligne pour la réalisation d’un projet ou l´aide à la création d´une entreprise. De nombreuses plateformes de ce type voient le jour actuellement en Afrique, particulièrement autour des industries créatives (musiques, films), mais également dans le monde des start-ups innovantes. En exemple, CrowVC (5) a récemment signé un accord de partenariat avec MLAB pour la promotion du Crowdfunding chez les entrepreneurs Kényans.
– Le travail distribué, où une équipe répartie de par le monde réalise un projet en y apportant savoir-faire et expertises. L’Afrique prend une part de plus en plus active à ce genre de modèle et on a l’habitude de citer ici comme référence la plateforme de coopération Samasource.
– La connaissance distribuée ou le collectage des informations et leur diffusion par le biais de toute personne connectée. Ushabili(6), né des troubles politiques au Kénia en 2007, qui informe de situations d’injustice et de dysfonctionnements, est devenu la référence du genre en Afrique et l’information géo localisée, ainsi produite par la population un véritable outil de pression sur le monde politique.
– Les outils collaboratifs utilisés pour gérer un projet par une communauté d’usagers. La mutualisation des ressources produit un effet d’économie durable et optimise à la fois les logiciels et les contenus. C’est le cas par exemple au sein de réseaux de responsables de Telecentres comme ceux des pays du Maghreb ou encore par exemple au Burundi *
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Un enjeu fondamental:
Quel modèle de gouvernance pour les applications de crowdsourcing?
Les pays africains paraissent donc avoir dans leurs pratiques traditionnelles tous les ingrédients nécessaires au développement de ces nouveaux écosystèmes numériques qui tendent à coloniser à la vitesse grand V l’espace économique du village global.
Plus que d’autres continents, l’Afrique peut être le terrain d’expérimentation d’une nouvelle économie basée sur la gestion de l’intelligence collective. Si peu d’africains sont encore actuellement sur le net, c’est qu’il y a peu de contenus produits pour et par les africains eux-mêmes, en déduit Google (7) qui depuis peu investit massivement en Afrique – un marché potentiel de 500 millions d´utilisateurs de téléphones mobiles et futurs internautes… producteurs d’informations, de services et de contenus.
Cette démarche du géant de la Silicon Valley marque bien l’enjeu stratégique sur la valeur de l’information, contenus et services partagés par les internautes eux-mêmes.
La question qui se pose pour l’avenir du crowdsourcing sur le continent tout comme sur l’ensemble de l’univers numérique d’ailleurs, c’est de pouvoir définir et faire appliquer le bon mode de gouvernance, polycentrique et durable. Quel choix faire entre les stratégies comme celle de Google ou celle de projets naissant sous Commons licences (8). Force est de constater que le Wikipedia africain (9) n’a pas encore vraiment trouvé preneur au sein des communautés autochtones et que le projet Afripedia lancé depuis peu de l’extérieur, fruit d’un partenariat entre l’association Wikimédia France, l’Institut français et l’Agence universitaire de la francophonie, a peu de chance de réussite sous sa forme clé USB en offline.
Un atout pour les projets éducatifs sur le continent ?
Si depuis peu de temps les initiatives de projets participatifs en ligne se multiplient de par le continent africain, elles se limitent encore à des secteurs bien déterminés et sont encore trop peu présentes dans le domaine de l’éducation et de la formation, de l’innovation pédagogique.
C’est peut-être fort de ce constat que l’UNESCO lançait en octobre 2011, le Prix Défi du Crowdsourcing pour l’éducation pour tous qui invitait les développeurs du monde entier à faire des propositions d’applications éducatives pour téléphones mobiles. Le projet Education Time Bank du kényan Eric Kontona (9) a été l’un des lauréats de ce prix. Par le biais de courtes sessions interactives et personnalisées, à condition de partager du savoir si on veut en recevoir, il vise à encourager adolescents et adultes à apprendre sur des thèmes hautement spécialisés.
eLearning Africa 2013 offre une belle possibilité aux acteurs africains du crowdsourcing pour l’innovation pédagogique de présenter leurs idées, leurs projets et leurs stratégies et de confirmer une fois de plus le dynamisme du continent dans le domaine des TIC et de l’innovation pédagogique.
- http://www.consommerdurable.com/2011/01/la-tontine-ou-lafrique-qui-sautofinance/
- http://en.wikipedia.org/wiki/Aakash_%28tablet%29
- http://en.wikipedia.org/wiki/WACS_%28cable_system%29
- http://blog.slateafrique.com/africa-tech/2011/07/11/opendata-le-kenya-lance-le-mouvement/
- http://www.growvc.com/main/
- http://fr.wikipedia.org/wiki/Ushahidi
- http://www.slateafrique.com/451/google-afrique-internet-diplomatie-technologie
- http://fr.wikipedia.org/wiki/Licence_Creative_Commons
- http://www.zdnet.fr/actualites/afripedia-un-projet-pour-developper-wikipedia-en-afrique-39773621.htm
- http://cdeacf.ca/actualite/2012/10/15/six-laureats-prix-defi-crowdsourcing-service-leducation-pour