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« Ne pensez pas trop, agissez ! » : le Top 10 des conseils des entrepreneurs technologiques africains

Photo by: Ssali Muzafaru
Photo by: Ssali Muzafaru

De nos jours, rares sont les gens qui doutent du potentiel technologique de l’Afrique. Les analystes et économistes du monde entier citent fréquemment l’Afrique comme le berceau de la future révolution mondiale, dans la lignée des « tigres asiatiques ». Le continent a toujours eu ses propres entrepreneurs, mais jamais leur activité n’a fait l’objet d’une telle attention, leur réussite étant considérée comme cruciale pour le développement de l’Afrique.

Par George Bodie 

Cette attention a aussi fait naître de nombreuses questions : comment alimenter cette culture naissante de la start-up ? Quels sont les obstacles qui empêchent les entrepreneurs d’avancer ? Et comment l’Edtech, une des industries les plus importantes et les plus innovantes de l’Afrique, peut-elle ouvrir la voie ?

Pour répondre à ces questions, eLearning Africa a décidé d’organiser un Tchat Twitter avec quatre des principaux entrepreneurs d’Edtech du continent : Rebecca Enonchong, fondatrice, au Cameroun, d’AppsTech, un fournisseur mondial d’applications pour les entreprises ; Mac-Jordan Degadjor, cofondateur de la société de marketing numérique Africa New Media au Ghana ; un autre Ghanéen, Raindolf Owusu, créateur du développeur de logiciels open source Oasis Websoft ; et le Kenyan Tonee Ndungu, créateur de l’application Kytabu. Voici les 10 principaux enseignements tirés de cette session, qui a obtenu un franc succès. Ils offrent aux personnes intéressées par le potentiel inexploité du marché de l’éducation en Afrique une liste des choses à faire et à ne pas faire.

Astuce 1 : l’Afrique est un lieu idéal pour lancer une entreprise high-tech

Marché naissant, l’Afrique offre de nombreux avantages. Selon Mac-Jordan Degadjor, « avec une population d’environ 1 milliard d’habitants, les start-up et les entrepreneurs sont assurés de trouver un marché pour leurs produits ». Rebecca Enonchong acquiesce en faisant remarquer « qu’il y a tant à faire ». En Afrique, déclare-t-elle, « nous avons beaucoup de place pour la créativité et l’innovation ».

Tout le monde s’accorde pour dire que le continent africain occupe une place croissante dans l’économie mondiale, mais qu’il n’a pas encore révélé tout son potentiel. Il regorge d’opportunités.

Astuce 2 : l’innovation est vitale

Ainsi s’exprime Mac-Jordan Degadjor : « l’innovation est l’âme d’une startup ». L’innovation crée de nouveaux environnements au sein desquels les nouvelles idées peuvent s’épanouir. L’Afrique en est un parfait exemple : les conditions qui y règnent ont produit des innovations qui ont changé notre regard sur la technologie. Parfait exemple de cette évolution, M-Pesa est une application mobile de gestion de l’argent qui a provoqué une véritable révolution dans le monde des services bancaires en ligne.

Astuce 3 : faites preuve d’imagination en matière de financement

Le financement est souvent un obstacle majeur pour les start-up africaines. De nombreux entrepreneurs sont obligés de se tourner vers des méthodes non traditionnelles pour réussir à trouver des fonds. Mac-Jordan Degadjor recommande d’utiliser d’abord ses propres économies pour « construire son produit/application [et] bâtir sa base de clientèle ». Le crowdfunding, les amis et la famille figurent sur sa liste de méthodes de financement.

Raindolf Owusu estime que la construction des prototypes a souvent lieu avant la recherche de financement. De plus en plus souvent, les Africains montrent que de véritables innovations technologiques peuvent naître d’un investissement limité – fabriquée à partir d’e-déchets, l’imprimante 3D du génie sénégalais Afate Gniko, qui a atteint une renommée internationale, en est un parfait exemple.

Astuce 4 : La #KillerApp n’est pas morte

Les « killer apps », c’est-à-dire les programmes ou applications considérés comme si indispensables qu’ils servent de fondement à une autre technologie, ont joué un rôle central dans le développement de la technologie ces dernières décennies. Il n’est pas rare, dans les cercles initiés d’entendre la question : « à quand la prochaine killer app ? ». Certains estiment cependant que, dans un paysage technologique en évolution très rapide, il est de plus en plus difficile pour les innovateurs de produire des applications révolutionnaires. Le changement a plutôt tendance à suivre une courbe progressive.

Les membres du panel ont pourtant unanimement contesté cette affirmation. Selon Raindolf Owusu, la réponse est clairement ‘non’ : « il existe tant de secteurs inexploités en Afrique qui ont besoin d’innovation frugale ».

Mac-Jordan Degadjor acquiesce, citant les nombreuses « idées innovantes qui émergent des hubs technologiques du continent ». Rebecca Enonchong va jusqu’à dire que « la killer app ne mourra jamais ».

Astuce 5 : croyez en votre business plan

La confiance en soi est, bien sûr, un élément essentiel du tempérament de tout entrepreneur. Tonee Ndungu a toujours été convaincu de l’intérêt de son projet. Lorsqu’on lui demande à quel moment il a su que son entreprise réussirait, il répond : « Avant même de commencer… Je pense qu’il est insensé de se lancer dans quelque chose sans y croire, que l’on sache ou non si cela va fonctionner. »

Rebecca Enonchong prétend avoir réalisé « que j’étais sur quelque chose de gros à peine mon business plan terminé ». Le consensus est clair : le doute n’a pas sa place dans le monde de l’entreprenariat technologique.

Astuce 6 : pour que les start-up réussissent, les gouvernements et la société civile doivent créer un environnement favorable

Les gouvernements africains sont de plus en plus conscients du pouvoir transformateur de l’innovation. Sur l’ensemble du continent, des hubs, des villes et des ateliers technologiques financés par les gouvernements voient le jour et s’associent à la société civile et aux entrepreneurs pour permettre à l’entreprenariat de réussir. Comme l’explique Rebecca Enonchong, « le gouvernement et la société civile ont leur place dans la création d’un environnement favorable à la recrudescence des investisseurs ». Il est de la responsabilité des entrepreneurs de travailler avec ces groupes, non seulement en bénéficiant des environnements ainsi créés, mais en participant à leur création.

Astuce 7 : les MOOC sont peut-être la solution d’avenir pour l’Afrique

L’eLearning est un domaine en progression constante dans le secteur de l’entreprenariat technologique, au point qu’il peut s’avérer difficile d’identifier les composantes les mieux à même de donner des résultats. Rebecca Enonchong conseille « d’investir dans le secteur qui vous passionne le plus ». Ceci est, bien évidemment, essentiel, mais quels sont les domaines les mieux positionnés pour répondre aux besoins de l’Afrique ?

Les cours en ligne ouverts et massifs (MOOC) pourraient en faire partie. Sur un continent doté d’une population extrêmement jeune et de plus en plus avide d’éducation supérieure, les MOOC pourraient prendre une place très importante et constituer la réponse à une demande croissante. Mac-Jordan Degadjor en est certain, puisqu’il estime que « l’avenir d’eLearning Africa réside dans un investissement massif dans les cours en ligne ouverts en Afrique ».

Astuce 8 : les problèmes locaux ont besoin de solutions locales

« L’entrepreneur ne fait rien d’autre que créer quelque chose qui rapporte régulièrement de l’argent ou qui fournit une solution à un problème local », estime Mac-Jordan Degadjor, et les nombreux exemples d’innovations cités ci-dessus corroborent cette affirmation.

Les difficultés de l’Afrique sont connues depuis longtemps, mais on parle moins de la capacité du continent à trouver ses propres solutions. Lorsqu’on lui demande ce qu’il changerait s’il pouvait repartir de zéro, Raindolf Owusu répond qu’il « se concentrerait davantage sur la résolution des grands problèmes de l’Afrique et sur l’impact véritable de son travail plutôt que d’essayer de bâtir un nouveau Facebook ou un nouveau navigateur Internet ».

Astuce 9 : interconnexion et innovation

Il est ressorti de la conversation que les entrepreneurs ne peuvent pas travailler seuls. L’importance du travail au sein de cadres existants et en collaboration avec les gouvernements et la société civile a déjà été mentionnée. À un niveau plus personnel, Mac-Jordan Degadjor conseille aux jeunes entrepreneurs de ne pas « agir seuls. Le défi et l’engagement sont extrêmes. Appuyez-vous sur votre réseau, vos amis et d’autres personnes importantes. »

Il conseille également de créer une équipe diversifiée : « N’engagez pas de personnes qui sont une copie exacte de vous-même ».

« Si vous arrêtez d’apprendre, vous ne comptez plus », ajoute Tonee Ndungu. Son conseil est « de rester un apprenant permanent. Les entrepreneurs sont toujours prêts à apprendre, à évoluer et à progresser. »

Astuce 10 : agissez

L’Afrique est présentée comme l’avenir de l’entreprenariat depuis suffisamment longtemps. Le message des experts est clair : il est temps de laisser les nouvelles idées se frayer un chemin vers le devant de la scène. Selon Rebecca Enonchong, « l’entreprenariat n’est qu’une question d’exécution ; trop de grandes idées et de business plans détaillés dorment au fond des tiroirs ». Son conseil ? « Ne pensez pas trop, ne planifiez pas trop. Agissez ! »

Pour en savoir plus sur les perspectives des entrepreneurs africains, rejoignez Tonee Ndungu et Rebecca Enonchong à la session ‘« À la rencontre de nouveaux entrepreneurs EdTech audacieux » de la conférence eLearning Africa 2015, du 20 au 22 mai à Addis-Abeba, Éthiopie.

 

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